Birth of a citizen history par Alain Delissen
L'historiographie sud-coréenne propose
une vision dichotomiale et nationaliste de la période de colonisation
japonaise qui n'est abordée que par le biais de la lutte d'indépendance.
Cette vision légitime le régime le place autant qu'il
répond à la question de l'essence même de la nation
coréenne actuellement divisée.
La logique de rupture vis à vis de la
période coloniale a repris vie dans les années 1990 avec
la décision de Kim Young Sam de raser le siège du gouvernement
colonial à Seoul. Mais il fut également celui des dictatures
militaires successives qu'entendait rejeter la nouvelle démocratie
libérale. Les débats historiographiques consécutifs
à cette décision démontre une remise en cause de
l'histoire officielle.
Si le Japon n'est pas directement responsable
de la guerre civile coréenne, les distorsions économiques
entre le Nord et le Sud de la péninsule remontent à l'occupation.
Le contexte intérieur et extérieur consécutif à
la libération n'a pas permis d'effectuer une purge des collaborateurs
qui furent plus nombreux que ce que l'histoire officielle veut bien
admettre. De telle sorte que le débat sur la collaboration reparait
actuellement car il n'a pas été résolu dans l'immédiat
après occupation à l'instar du cas français.
De nombreux auteurs hors du cénacle historique
universitaire ont abordé sous des angles différents la
question de l'héritage japonais. Cela démontre une revitalisation
de la conscience et de l'intérêt historique en Corée
après des décennies de censure imposées par l'establishment.
Seoul et le langage de l'architecture modifiable par Robert
Fouser
L'architecture modifiable se caractétise
par l'absence de pérennité dans sa vocation. Réduit
à sa dimension fonctionnelle et nécessitant peu de capitaux
à la construction, il reste destructible si le marché
l'exige. Ce type d'architecture n'est pas contraint par une force de
planification centrale qui a su rester discrete tout au long de l'histoire
de la ville. Celle-ci s'est développé essentiellement
au XXème siècle en conquérant ses nouveaux
espaces notamment vers le sud.
L'une des manifestations les plus emblématiques
de ce développement rapide est le cycle de vie caractéristique
des commerces (cafés en l'occurence) et des bâtiments qui
les abritent. Succès et déclin se succèdent au
gré des modes dont le rythme de renouvellement influe sur l'apparence
de la ville. A Taehagno, plus qu'ailleurs à Seoul, il est possible
de voir le développement de ces immeubles de plusieurs étages
à usage commercial qui ont remplacé la maison traditionnelle
devenue en son temps trop petite pour le restaurant qui y avait élu
domicile. A Sanggye-Dong on peut retrouver tout un quartier de moins
de vingt ans avec notamment les hautes tours de type HLM des grands
ensembles d'habitation qu'apprécient les Coréens pour
leur fonctionnalité. La ville se renouvele en son propre sein
à Seoul, elle gagne en hauteur et perd peu à peu son attrait
au fur et à mesure que les nouvelles constructions rendent obsolètes
et méprisables la génération précédente.
Reste que pour une économie à la
croissance fulgurante, l'architecture, dite modifiable, devait remplir
un rôle plus fonctionnel qu'artistique.
Les prisonniers de guerre sud-coréens retenus en Corée
du Nord par Heo Man-Ho.
Pendant la guerre de Corée, la Corée
du Nord n'a pas hésité à intégrer de gré
ou de force dans ses rangs des prisonniers sud-coréens ou à
les faire travailler dans des conditions dangereuses. L'application
des conventions de La Haye n'a pas été respecté
loin s'en faut. Mais le conflit s'apparentant - au début - à
une guerre civile dont les sources remontent bien avant 1950, les conventions
avaient peu de chances d'être appliquées d'autant plus
qu'elles n'étaient pas signées par les gouvernements coréens.
Le point des rapatriements de ces prisonniers fut l'un des points d'achoppements
pendant les négociations d'armistice. La Corée du Nord
refusait le principe du rapatriement volontaire qui laissait le choix
à l'individu de peur de voir partir la majorité des quelques
80 000 prisonniers qu'elle détenait (ce chiffre est soumis à
de grandes interrogations).
En 1953, la libération par le Sud des
prisonniers s'étant déclarés anti-communistes n'a
pas facilité les négociations. La situation est bloquée
jusqu'à aujourd'hui dans la mesure où le Nord a empêché
le rapatriement des prisonniers contrairement aux spécifications
de l'accord d'armistice signé entre l'ONU et les forces communistes.
La vie des prisonniers après l'armistice fut celle d'une population
soupçonnée en permanence par le régime. Ils ont
été affectés pour la plupart à des travaux
de force et soumis à des contrôles renforcés.
La question du rapatriement doit se négocier
dans le cadre des négociations quadripartites pour avoir une
chance d'aboutir. Encore faut-il que le gouvernement sud-coréen
sorte de sa passivité.
Popular movements in contmeporary South Korea par Lee Su-Hoon.
Suite à la libéralisation du régime
militaire en 1987 après la "déclaration du 29 juin",
les mouvements organisés de protestation populaire prirent une
dimension plus importante quels que soient les domaines concernés.
L'un d'entre eux, l'environnement et l'écologie
répondait aux ravages du développement économique
à marche forcé. Plusieurs groupes constituèrent
les prémices d'une contestation populaire bien avant la libéralisation
du régime grâce notamment à la couverture des Eglises.
La lutte contre le nucléaire devint également une préoccupation
de la population coréenne à partir de la fin des années
1980 et l'incident de Tchernobyl.
L'installation dans le paysage socio-politique
de ces groupes de contestation de l'establishment et de sa politique
profita de l'intérêt grandissant du public pour leur luttte.
Les mass media devinrent dès lors les meilleurs relais de leurs
revendications à la faveur d'incidents à la pollution
répétés.
Introducing Korean literature to English readership par
Lee Sung-Il.
Une oeuvre littéraire a un rythme et une
sonorité propres à la la langue de l'auteur que ne saurait
retraduire précisément. Le Coréen n'échappe
pas à cette règle. Lee Sung-Il nous propose et nous explique
une de ses traductions d'un Kasa (qu'il serait ici évidemment
vain de vouloir résumer...).
Population de Koguryo au VIIème siècle
par Li Ogg.
L'estimation de la population du royaume de Koguryo
doit être revisitée tant les estimations traditionnelles
se contredisent. L'historien devant se fonder sur les annales chinoises
ou coréennes antique, la précision n'est pas de mise.
En puisant dans les sources historiques et en
extrapolant le rythme de croissance chinoise au Nord de la Corée,
la population de Koguryo s'éleverait entre 900 000 et 1 000 000
d'habitants.
Réformes financières et crise bancaire par
Geneviève Marchini.
La crise financière de 1997 s'inscrit
dans la déréglementation du système bancaire et
financier coréen dans les années 1990. Auparavant, le
pouvoir politique dirigeait les ressources financières selon
un plan défini qui favorisait le développement de certains
secteurs au détriment d'autres. La fixation de taux réels
négatifs par l'allocation de prêts bonifiés était
l'un des ressorts majeurs de cette politique qui se caractérisait
également par une restriction importante des mouvements de capitaux.
Les échanges avec l'extérieur étaient encadrés
par des institutions financières semi-étatiques. Le développement
d'institutions non bancaires pendant les années 1970 répondait
à une volonté gouvernementale de diversifier les sources
de financement des chaebols comme de capter les financements souterrains.
Ce n'est qu'après la crise de 1980, que
le système financier coréen va opérer une dérégulation
progressive. D'abord formelle avec la privatisation capitalistique des
banques commerciales et l'ouverture limitée du pays aux investissements
étrangers, elle devint plus notable pendant les années
1990. Les restrictions à l'allocation des crédits furent
considérablement allégées alors que se développaient
en dehors des banques commerciales, des banques d'investissements non
soumises aux autorités de tutelle bancaire classiques. Les possibilités
d'investissements étrangers furent élargies tout comme
les mouvements de capitaux - pour les particuliers et les sociétés.
La crise est intervenue en pleine transition
du système financier coréen. Disposant des outils et de
l'expérience limités d'un secteur autrefois sous tutelle,
les banques se sont retrouvées gestionnaires des encours hérités
de la période de croissance alors que la garantie tacite de l'Etat
coréen s'effilochait. L'autorisation de l'endettement extérieur,
principalement à court terme a poussé les banques à
couvrir les prêts à long terme accordés aux entreprises
par des emprunts à court terme sur les marchés extérieurs.
|
Sous la férule du FMI, la Corée
a procédé à plusieurs réformes de son système
et a poursuivi la libéralisation. La création d'un organe
de supervision unique (la FSC) doit concourir au développement
d'une culture de prudence (respect des ratios habituels de la profession)
et de rigueur dans l'allocation des crédits qui fit cruellement
défaut dans les années 1990. Afin de réduire les
différences entre les barrières à l'entrée
et à la sortie des capitaux, les investissements étrangers
ont été encouragés et très nettement libéralisés.
Ces réformes se sont accompagnées d'un assainissement
de l'encours coréen par le biais d'une recapitalisation du secteur
par la KDIC et de la mise en place d'une structure de defeasance (la
KAMCO). Certaines merchant banks ont été fermées
et de grandes banques commerciales fusionnées alors que les groupes
étrangers s'intéressent de plus en plus à leurs
confrères coréens. Il n'en reste pas moins que l'influence
étatique est prépondérante à l'heure actuelle
à la fois dans le capital mais dans la politique des grands groupes
bancaires.
Les fluctuations de l'identité des Coréens en Chine
par Geneviève Marchini.
La force du sentiment ethnique d'une population
s'analyse en fonction des rapports qu'elle entretient avec le groupe
dominant dans l'Etat nation. Les revendications ethniques, au delà
de la préservation d'une différence, d'une identité
culturelle et sociale peuvent devenir les vecteurs d'une volonté
politique ou économique. L'instrumentalisation de cette identité
à des fins d'amélioration de la condition de la communauté
s'apparente plus à l'analyse de l'ethnicité que l'étude
proprement dite de la culture et des traditions du groupe. Coment dans
ces conditions vivent les Coréens de Chine leur nationalité
chinoise ?
Installés de longue date en Manchourie,
les Coréens y affluèrent plus encore lorsque les Japonais
annexèrent la Corée en 1910. En 1949 les communistes chinois
s'appuyèrent sur leurs collègues coréens en Mandchourie
pour s'approprier la maîtrise du territoire. Les Coréens
de Mandchourie prirent naturellement part à la guerre de Corée
et certains d'entre eux restèrent au service de Kim Il-Sung.
La Chine développa une politique léniniste de favorisation
des ethnies afin d'éviter toute contestation communautaire du
régime et de renforcer la souverainenté de la République
populaire de Chine sur les peuples allogènes.
Autonomie des comtés coréens, proportionnalité
dans la représentation des ethnies séduirent les Coréens
de Chine en premier lieu. Mais après l'échec du grand
bond en avant, la Corée du Nord accueillit avec bienveillance
les brebis coréennes égarées en Chine. En 1962,
avec le réchauffement des relations entre Beijing et Pyongyang,
Kim laissa repartir en Chine les sino-coréens désabusés
des conditions de vie en Corée du Nord. Ce choix n'est dicté
que par des impératifs de confort mais ne préjuge pas
de l'attachement à la défense de l'identité. Celle-ci
passe non pas par la loyauté à une nation et à
l'Etat qui la représente mais par la continuation d'une culture
d'origine. Dans les années 1980, Pékin aida la communauté
coréenne à profiter du développement économique
ce qui renforça le sentiment d'appartenance à la Chine
et légétima la perpétuation des traditions et de
la langue comme fondement de l'aide.
Après un coup de foudre dans les années
1990, Sino-coréens et Coréens du Sud prirent la mesure
de leur différences économiques comme culturelles. C'est
à l'heure actuelle le dernier va-et-vient de "l'identité
négociable" des Coréens de Chine.
The Korean immigration in Mexico par Alfredo Romero-Castilla.
La documentation disponible sur l'histoire de
l'immigration coréenne au Mexique reste très restreinte.
En outre, l'exploitation des recensements de population dans la première
moitié du XXème siècle ne semble pas
suffisamment sûre.
Le recoupement de diverses sources d'informations
permet d'affirmer qu'un millier de paysans pauvres coréens furent
recrutés comme main d'oeuvre destinée à des plantation
du Yucatan. Arrivés de Corée en 1905, ils travaillèrent
dans des conditions de quasi esclavage et hors de tout contrôle
d'un gouvernement coréen ignorant de l'existence de l'émigration.
Au bout de quatre ans, ils commencèrent à se disperser
au Mexique, à Cuba.
Eloignés du groupe d'origine, les immigrés
coréens s'intégrèrent peu à peu. Mariages
mixtes et éducation mexicaine achevèrent l'assimilation
des nouveaux venus.
L'économie coréenne par Yang Tae-Kyu.
Le succès de l'économie coréenne
est enracinée profondément dans certaines valeurs confucéennes
: travail, collectivité, education, frugalité. Les chaebols,
charpentes du développement volontariste coréen, possèdent
des caractéristiques communes, autour du dynamisme entrepreunarial
d'un fondateur paternaliste s'est constituée une communautée
soudée de cadres souvent issus des mêmes écoles.
A l'heure actuelle, la Corée doit restreindre
la puissance envahissante de ses grands groupes, mais cela pose le problème
de l'économie toute entière compte tenu de leur poids.
Cela passera par l'intégration et la bonne utilisation de valeurs
occidentales (pragmatisme, libéralisme, transparence, notamment).
Les réformes doivent porter sur les modes de gestion (sociales
et financières) des entreprises (réduction de la dette
et remembrements) ainsi que sur la restructuration du système
financier (recherche de la rentabilité des financements).
Cependant, il est illusoire de croire en la réussite
de l'implantation d'un modèle imposé par l'occident. C'est
dans la sublimation des valeurs asiatiques et occidentales, que la Corée
franchira cette épreuve.
Médias ethniques coréens au Québec : perspectives
des immigrants dans le processus d'intégration.
par Yim Seong-Sook.
Je n'entrerai pas dans le détail de l'article
de Yim Seong-Sook puisqu'il s'agit d'analyse effectuée d'après
des retranscription détaillée d'entretiens avec des émigrés
au Quebec. Après une présentation de l'immigration coréenne
au Quebec et des media locaux utilisés par cette communauté,
l'auteur tente une classification des intervenants selon les catégories
suivantes :
- Gens d'affaires
- Travailleurs salariés et professionnel
- Jeunes étudiants
- Personnes âgées à la retraite.
A la lecture de cet article, on prend réellement
conscience du fort sentiment d'appartenance à la communauté
coréenne, notamment renforcé en raison du contexte particulier
du Quebec qui entretient dans une certaine mesure un climat de méfiance
envers les non francophones.
Eléments du code culturels coréen : étude des
religions et des cultes de la Corée ancienne. par Yoo
Jung-Hwan.
La Corée est un creuset de croyances,
parmi lesquelles le chamanisme a occupé la première place.
Le chamanisme d'inspiration locale fut supplanté chez les élites
par des religions étrangères à l'époque
de Silla.
Le bouddhisme du grand véhicule connut
un essor spectaculaire jusqu'à la dynastie Choson et se propagea
dans la population. Maisc C'est à ce moment que la nouvelle élite
néo-confucianiste deviendra croyance officielle et rabaissera
le bouddhisme autant qu'elle le pourra en raison entre autres des excès
du clergé bouddhique dans la fin de la dynastie Koryo.
Outre le bouddhisme, le taoisme venu de Chine
s'est acclimaté à la péninsule en épousant
les croyance locales déjà diverses. Enfin le confucianisme
devient peu à peu la doctrine dominante détenant la main
haute sur l'administration étatique.
L'étonnant syncrétisme coréen
a pu croître en raison de l'absence de Dieu unique, jaloux de
son pouvoir et exclusif. Les Coréens épousèrent
ces doctrines selon leur position sociale : aux élites dirigeantes
le confucianisme, les femmes préféraient le bouddhisme,
quant aux miséreux ou aux couches populaires le bouddhisme et
le chamanisme recueillaient la ferveur. Mais il est important de souligner
que la pratique d'une religion n'excluait pas toute autre foi et qu'au
contraire le mélange des genres présidait à la
religiosité coréenne.
L'homme se trouve au centre de ces doctrines,
le chamane appelle les "mânes" des ancêtres pour
le bien des vivants, le confucianisme édicte des règles
de comportement à l'usage des vivants.
|